Verger circulaire zéro phyto.
Le 21 mars nous avons été reçus par Solène Borne, chercheur au centre expérimental de l’INRAE à Gotheron, pour la visite du verger expérimental fonctionnant sans pesticides et sans intrants.
Sachant qu’un verger conventionnel ou même un verger bio nécessite en moyenne une quarantaine de traitements par an, l’INRAE mène depuis de nombreuses années des expériences visant à limiter l’usage des pesticides en jouant à la fois sur la sélection variétale et sur la conception du système agroécologique.
Le projet a été lancé en 2015. Trois années ont été nécessaires pour concevoir ce verger de 1,5 ha associant plusieurs espèces et variétés fruitières, des plantes de service, des dispositifs de régulation, de manière à créer un environnement très défavorable aux bio-agresseurs. Le verger est suivi de très près quotidiennement de façon à comprendre les mécanismes d’auto-règulation qui se mettent en place. Le projet prévoit un suivi du verger jusqu’en 2030.
Le verger est organisé en cercle afin de limiter la surface d’échange avec l’extérieur.
Le premier cercle extérieur est une double haie évolutive de 500 mètres de long composés d’arbres de haut-jet au centre (amandier, châtaignier), entourés d’arbres de plus petites dimensions (sureau, noisetier, frêne, laurier tin, néflier, …) assurant un effet brise-vent et constituant une barrière à la progression des ravageurs. Elle constitue également une zone de biodiversité qui fournit ressources alimentaires et habitats à la faune auxiliaire. Ces auxiliaires sont des prédateurs ou parasitoïdes, vertébrés et invertébrés, qui contribuent à la régulation des populations de ravageurs des arbres fruitiers (pucerons, campagnols…).
Le long de cette première barrière sont installés des nichoirs, des perchoirs, des tas de branchages et des pierriers qui favorisent l’installation des auxiliaires prédateurs tels que les mésanges insectivores, les rapaces, les reptiles et les belettes (prédateurs de campagnols).
Le deuxième cercle extérieur est composé de 2 variétés de pommiers hâtifs et peu sensibles (variétés Florina et Arkane). Ils jouent le rôle de piège, fixant les pucerons qui ont pu franchir la double haie, et permettant d’attirer et de capturer le carpocapse dès le mois d’août. Les pommes véreuses sont mises en culture en augmentarium pour élevage de parasitoïdes du carpocapse.
Des aromatiques (lavandes et romarins) émettant des composés organiques volatils sont plantés au pied des arbres pour leur effet anti-puceron.
L’inter-rang est divisé en 3 zones : la partie centrale n’est jamais fauchée, elle constitue un refuge pour les insectes et araignées. Les parties extérieures sont fauchées en alternance avec un délai minimum de 3 semaines.
Le cercle suivant est une haie fruitière constituée d’arbres et arbustes variés, (12 espèces et 19 variétés de production secondaires : groseiller, framboisier, noisetier, néflier, arbousier, pistachier, grenadier, figuier, …) prenant notamment en compte le contexte de changement climatique.
Les petits arbustes bloquent les feuilles mortes au sol et empêchent la contamination par le vent des autres fruitiers, notamment par la tavelure.
Les 6 cercles intérieurs concentrent l’essentiel de l’espace de production (4 espèces : pommiers, pêchers, pruniers et abricotiers). Les 14 variétés choisies pour leur résistance naturelle aux ravageurs et aux maladies sont plantées en duo. La zone de production est agencée en spirales imbriquées ce qui permet de mélanger les espèces et d’optimiser les déplacements en évitant les trajets à vide et le tassement du sol.
Au centre, une friche et une mare interdite d’accès constituent une zone de biodiversité protégée.
L’entretien du verger est volontairement très limité pour favoriser l’autorégulation. Aucun intrant, ni pesticides, ni engrais, seulement un tout petit peu de compost. La taille est limitée pour éviter les lésions et les maladies fongiques. Pas de badigeon.
Les travaux se limitent à l’arrosage en goutte à goutte ou par aspersion selon les espèces, et à la capture de carpocapse à l’aide de bandes cartonnées.
Des interventions sont effectuées en cas d’échec ; par exemple, remplacement des abricotiers qui meurent de l’enroulement chlorotique de l’abricotier par du kiwi. Reste à voir le comportement du kiwi qui est lui aussi sujet à maladie dans la Drôme.
Participaient également à cette visite des représentants des croqueurs de pommes des Vergers du Lyonnais et de l’Ecosite Magn’Ethique, ainsi que des agriculteurs et conseillers agricoles. Cette visite a donné lieu à des échanges très intéressants sur de nombreux sujets que vous pouvez découvrir plus en détail ici.
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